Prodways, filiale spécialisée dans l’impression 3D du Groupe Gorgé, se rêve en numéro 3 mondial du secteur. Derrière les géants américains Stratasys et 3D Systems. A-t-elle les moyens de ses ambitions ? Premiers éléments de réponse avec Cindy Mannevy, Marketing & Communication Manager chez Prodways.

 

Comment est né Prodways ?

Nous sommes un pôle d’excellence 3D à part au sein du Groupe Gorgé. Prodways est né du rachat de la société Phidias Technologies et plus particulièrement de la rencontre entre Raphaël Gorgé et André-Luc Allanic, créateur de la technologie MOVINGLight®. En deux ans, nous sommes passé d’une à 150 personnes.

 

André-Luc Allanic et Raphaël Gorgé, PDG du Groupe Gorgé

André-Luc Allanic et Raphaël Gorgé, PDG du Groupe Gorgé

 

 

Que fait Prodways ?

 

Prodways est un fabricant d’imprimantes 3D. On vend des imprimantes, des matières, des solutions d’engineering, bref, le panel complet de la fabrication additive. On se positionne sur un segment B2B à forte industrialisation. On ne fait pas du tout d’imprimantes familiales ni destinées aux TPE/PME. Nos imprimantes, à fortes capacités de production, ciblent les industriels, voire les intégrateurs. Donc c’est vraiment du B2B2B.

 

Les imprimantes 3D de Prodways

Les imprimantes 3D de Prodways

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Quel est votre avantage par rapport à vos concurrents ?

 

Tout d’abord, il faut savoir que l’impression 3D s’oriente surtout en fonction des technologies disponibles. Aujourd’hui, nous sommes propriétaires de la technologie MOVINGLight®. Cette technologie brevetée et unique, à la base de la fondation de Prodways, se rapproche de la stéréolithographie.

Avec les technologies concurrentes, imprimer des pièces ultra précises va vous demander des heures et des heures. Ou alors vous  voulez produire en masse et à ce moment-là vous ne devez pas avoir de trop grandes exigences en termes de précision. Notre technologie est la seule qui permet d’obtenir à la fois de grosses capacités de production et un niveau élevé de précision et de résolution.

 

À quelle(s) problématique (s) faites-vous face ?

 

Aujourd’hui, l’une de nos principales problématiques, c’est la gestion de la confidentialité. Quand une entreprise vous envoie un fichier STL*, elle vous envoie tout le savoir de sa société, du bureau d’études, ce qui fait sa valeur ajoutée.

C’est pourquoi si vous allez sur notre site internet, vous verrez très peu d’ « application cases », ou alors sur des pièces qui datent de vingt ans et qui n’ont donc rien de révolutionnaire.  On a signé des « non disclosure agreement» qui nous empêchent de communiquer sur nos très nombreux projets de développement.

Sur le plan informatique, les fichiers STL sont des fichiers très lourds qu’on ne peut pas envoyer par simple email, donc il y a de grosses contraintes de sécurisation des réseaux pour éviter les fuites, que cela ne passe par WeTransfer ou d’autres réseaux non sécurisés.

 

Plus généralement, sur quels  secteurs vous positionnez-vous ?

 

Majoritairement et historiquement, on est dans le dentaire. Cela peut paraître étonnant, mais le marché du dentaire est le marché qui est le plus mature sur l’impression 3D.

Je ne sais pas si vous avez déjà eu un appareil dentaire, mais avant, pour prendre l’empreinte de votre mâchoire, le dentiste vous mettait un moule infâme dans la bouche. Ce n’était pas précis du tout. Aujourd’hui, ils vous mettent une petite boule dans la bouche, la petite boule scanne, ça dure trente secondes à peine, et le fichier STL est envoyé à une imprimante qui fabrique le modèle.

Mâchoire-humaine-créée-par-une-imprimante-3D-de-Prodways

Mâchoire humaine créée par une imprimante 3D Prodways

 

 La technologie est si précise que si vous ne vous êtes pas bien brossé les dents, et qu’il vous reste un bout de saucisson, le scan va l’enregistrer et l’imprimante réimprimer le bout de saucisson entre vos dents.

Pour en revenir aux secteurs de nos clients, viennent ensuite les grosses industries comme l’aérospatial ou l’automobile, qui font du moule à injection et des machines-outils . Et enfin le médical et la bijouterie.

 

Quel est votre business model ?

 

Nous avons un rôle d’aide et de conseil sur toutes les étapes de la chaîne 3D. La première étape pour nos clients, c’est d’optimiser leurs fichiers 3D. Nous avons donc des ingénieurs spécialisés qui les aident à prototyper leurs pièces en 3D. La deuxième étape, c’est quand ils ont leur fichier STL et qu’ils se demandent : « qu’est-ce que j’en fais ? ». Là, soit ils trouvent que ce n’est pas bien et on refait toute une étude de prototypage, soit ils souhaitent l’imprimer. Et là, nous les conseillons sur la technologie d’impression qui correspond à leur projet.

Ensuite, soit notre service bureau imprime leurs pièces à la demande ou alors, si la production est très importante, nos clients ne voudront pas payer à la pièce et la meilleure solution consistera alors à acheter l’une de nos machines. Dans ce deuxième cas de figure, on leur proposera la machine et les matières qui correspondent à leur besoin.

 

Une fois que vos clients ont acheté vos machines, j’imagine que la relation ne s’arrête pas là ?  

Absolument, nous continuons de les accompagner. Nous intervenons à chaque étape du cycle de vie de l’additive manufacturing.

 

Comment comptez-vous vous différencier de ces mastodontes américains, qui dominent le marché de l’impression 3D. La bataille va-t-elle se jouer sur les technologies brevetées ou davantage sur les services et les usages ?

 

Cela va se jouer sur les deux tableaux. Mais le principal enjeu sera de fournir des services globaux, avec un vrai accompagnement et un vrai savoir-faire.

Au début on travaillait sur de la photopolymérisation, ensuite on est passés sur le frittage de poudre. Maintenant, notre différence ne se fait pas vraiment là, puisque Stratasys et 3D Systems sont déjà multi-technologies.

Notre vraie différenciation va plutôt se jouer sur le service et l’accompagnement. Aujourd’hui, 3D Systems utilise des machines « fermées ». Nos machines, elles, sont « semi-ouvertes », c’est-à-dire qu’on noue des partenariats et qu’on développe des applications afin de rester toujours au cœur de la demande du client.

Par exemple, si un client formule un besoin lié à la biocompatibilité ou souhaite imprimer dans d’autres matériaux, on va être capable d’ouvrir la porte à des partenariats « matières » avec le CEA, 3DCeram, DeltaMed et d’autres.

 

Pensez-vous que vous vous orienterez un jour vers le B2C ?

Pour l’instant, ce n’est pas du tout notre préoccupation.

 

*Le format STL, pour « stéréolithographie », a été créé par l’entreprise 3D Systems. C’est le format de fichier utilisé par la majorité des sociétés travaillant dans l’impression 3D.