Le programmatique qualifie l’ensemble des campagnes publicitaires automatisées. L’automation repose sur un écosystème complexe régi par des algorithmes. Ces derniers permettent de faire concorder l’offre et la demande selon des critères de pertinence et de prix. Si le programmatique a révolutionné la publicité sur internet, il est naissant sur le secteur de la télévision.

Le programmatique, écosystème de la publicité web

Le programmatique repose sur un système de places de marché (AdExchange et AdNetwork). Les éditeurs de contenus y proposent des espaces publicitaires disponibles sur leurs médias (l’offre). Les annonceurs et agences de communication y achètent les espaces publicitaires pour communiquer (la demande).

L’offre et la demande se rencontrent de manière automatisée. Les bannières et vidéos publicitaires sont vendues selon un système d’enchères en temps réel (RTB : Real Time Bidding).

Les enchères sont optimisées par des algorithmes eux-mêmes alimentés par des grandes quantités de données (ATD, DSP, SSP). Les éditeurs de contenus injectent leurs données d’audience et les annonceurs injectent leurs données de segmentation.

Ces algorithmes ont pour missions l’optimisation du ciblage (proposer la bonne pub à la bonne personne, au bon moment) et l’optimisation des coûts (proposer le meilleur prix de vente et le meilleur prix d’achat par impression).

Le programmatique représente 50% de la publicité display en France (S1 2016).

La Télévision, dernier écran à séduire

Souvent nommé « adressable TV » en anglais, le programmatique TV consiste à diffuser des pubs différentes aux personnes qui regardent le même programme.

De nouvelles opportunités grâce au programmatique

Le prix d’accès à la publicité TV est extrêmement élevé. Ce coût est dû à la large audience qu’offre le média et qui n’est adressable que globalement .

Ceci pourrait ne plus être vrai très longtemps. Le programmatique ouvre des opportunités de segmentation beaucoup plus fines qu’auparavant. Une audience restreinte mais ciblée, voilà une solution qui pourrait séduire de nombreuses entreprises (TPE/PME) jusque là incapables d’investir en télévision.

On pourrait, également, imaginer des campagne de retargeting cross-canal. Le site e-commerce Amazon, par exemple, diffuserait une publicité ciblée sur les chaussures que vous avez regardées sur internet quelques heures plus tôt.

Les opportunités semblent infinies, tant que la loi permettra certains usages et transferts de données.

Addressable TV

Le principe de programmatique TV / « addressable TV » en anglais. Crédit illustration

L’enjeu : 220 à 300 millions d’euros en Europe d’ici deux ans

Les résultats d’une récente étude réalisée sur le sujet par Enders Analisys pour la régie de Google, DoubleClick, sont éloquents. Sur sept marchés européens (France, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Suède, Turquie et Royaume-Uni) les investissements en programmatique TV pourraient déjà atteindre 220 à 300 millions d’euros, d’ici deux ans. Il s’agit à moyen terme de l’une des plus grandes opportunités sur le marché de la publicité.

A titre de comparaison on retiendra :

  • 271 millions d’euros, le volume du programmatique display (en France, au S1 2016)
  • 5% des publicités TV aux Etats-Uni ont été achetées en programmatique en 2015 (selon Harmelin Media)
  • 20% de croissance des revenus publicitaires en 2015 pour le groupe Sky, grâce au programmatique (selon CB News)

Les défis : investissements, technologies, compétences et lois

Le programmatique repose sur des infrastructures informatiques développées. Le média télévisé devra s’équiper technologiquement pour mettre en place un système de publicités vendues en temps réel. Cette transition implique des investissements lourds, mais probablement très rentables.

C’est d’ailleurs ce que le groupe britannique Sky a expérimenté. Preuve que les solutions existent déjà sur le plan technologique. Le système anglais « Adsmart » propose la commercialisation de publicités en programmatique pour la télévision (« addressable TV ad« ). Il a permis à Sky la diffusion de 3 milliards de pubs personnalisées sur les écrans de ses abonnés. Ce premier succès ouvre la porte à d’autres acteurs comme France Télévisions qui compte expérimenter la solution courant 2017.

L’année 2017 est également propice aux développement de nouvelles compétences spécifiques à ce nouveau secteur d’activité. Les médias redoutent les manquements technologiques et humains qui provoqueraient un écran blanc à la place d’un spot publicitaire.

Il reste également un défi législatif qui ne doit pas être ignoré. La CNIL réalise un grand travail pour la protection des données. A chaque innovation technologique il faut établir les bonnes pratiques qui s’y appliquent. Le programmatique TV est à ses balbutiements et l’établissement des règles jouera un rôle important sur l’évolution de ce marché.

Vers une unification des médias Internet et Télévision ?

La TV traditionnelle (y compris la TNT) est appelée « télévision linéaire ». Elle propose un contenu unique diffusé à tous, à un moment unique.

Cependant, des modes alternatifs se sont mis en place depuis quelques années. Par opposition au modèle précédent, ils sont regroupés sous le nom de « télévision non linéaire » :

  • L’IPTV fonctionne sur le système des adresses IP comme les ordinateurs. Le développement des IPTV s’est accéléré avec les offres “triple-play” (télévision, téléphone, internet) proposées par les fournisseurs d’accès à internet (FAI).
  • Le nouveau mode de consommation se nomme la VOD (video on-demand). Les émissions et les films peuvent être consommés à la carte. Contrairement à la télévision linéaire, un contenu unique est diffusé à une personne à un moment non-défini préalablement.
  • Le rapprochement entre les médias télévision et internet va encore plus loin depuis l’arrivée des Chromecast et Apple TV. Ces appareils permettent de consommer du contenu vidéo, depuis internet, sur l’écran de la télévision. La télé devient une simple extension de nos smartphones.

Si les deux médias se rapprochent encore sur le plan des contenus et des modes de consommation, on peut également imaginer une fusion de leurs modèles économiques et publicitaires.

Conclusion

L’implication de la télévision dans l’écosystème du programmatique permettra de faciliter l’élaboration de stratégies cross-canal. Le programmatique TV promet de répondre à deux objectifs des médias et des annonceurs : le premier objectif est la pertinence (la bonne publicité, au bon moment, diffusée à la bonne personne) et le second objectif est l’optimisation des recettes et des coûts.

L’ensemble des sujets évoqués seront étudiés le 24 novembre 2016 lors d’une Conférence organisée par Nétineo chez Google. Cette conférence fera l’objet d’un nouvel article et d’un LiveTweet. Suivez également mon blog. Pour en savoir plus sur l’événement cliquez ici.