Vers une généralisation du paiement mobile ?

« Le paiement mobile ne doit pas simplement remplacer le paiement par carte bancaire ou en liquide, il faut apporter une valeur ajoutée à l’utilisateur pour que cela fonctionne. Quand une utilisation du paiement mobile est adoptée sur un marché c’est qu’elle s’accompagne d’un service complémentaire. »
Bertrand Jonquois, membre de MMA et co-fondateur d’Atsukè

D’après l’index des paiements mobile de Adyen, pionner en technologie de paiement, 32% des transactions en ligne dans le monde ont été réalisées en 2016 depuis un mobile. L’étude « Panorama de l’E-commerce et de la distribution en 2026 » réalisée par le cabinet de conseil Ovum en partenariat avec Critéo annonce 2,08 milliards d’utilisateurs sur les paiements mobile en 2018 contre seulement 452 millions en 2014.

De même, l’apparition de nouvelles solutions telles qu’Apple Pay ou TransferWise qui vient d’annoncer l’intégration d’un bot dans Facebook Messenger pour réaliser des transferts d’argent depuis les smartphones bousculent le marché.

Transferwise via Messenger Facebook

Paiement Transferwise via Messenger Facebook

Une question se pose : Paierons-nous tous demain avec notre mobile ?

Bertrand Jonquois, membre du conseil d’administration de la Mobile Marketing Association de France, & co fondateur de Atsukè nous livre sa vision.

« On constate qu’il n’y a pas une généralisation d’un seul mode de paiement mobile mais la mise en œuvre de solutions sur des segments des marchés spécifiques.

En France, la carte bancaire est un moyen de paiement historique, le système sécurisé est rodé. Le coût de la transaction est également très faible. Les paiements mobile engendrent nécessairement des coûts : raccordements, coûts techniques, développement de solutions ou d’applications… Qui prend en charge ce coût et pourquoi ?

Il ne suffit pas simplement de remplacer le paiement par carte bancaire ou en liquide par le paiement mobile, il faut apporter une valeur ajoutée à l’utilisateur pour que cela fonctionne.

Quand une utilisation du paiement mobile est adoptée sur un marché c’est qu’elle s’accompagne d’un service complémentaire. Le paiement en lui-même ne suffit pas. La généralisation ne se fera pas d’un coup de baguette magique, les utilisateurs et les intermédiaires doivent trouver leur intérêt. L’avenir du paiement mobile, où que ce soit, dépendra des propositions de valeur qui seront faites. »

services mobile

Des services et du paiement mobile

Des services au service du paiement mobile

Des marques comme Starbuck ou Wallmart ont bien compris les avantages que peuvent engendrées ce type de transaction. En développant des applications de paiement mobile, elles se sont rapprochées en temps réel des consommateurs. L’application n’est pas uniquement un mode paiement mais devient clairement un outil de communication. La marque peut géolocaliser et communiquer en temps réel avec ses clients et les fidéliser. Pour l’utilisateur, c’est la promesse d’une expérience simplifiée, d’un service personnalisé et de réductions immédiates.

paiement mobile

YoYo Wallet, paiement Mobile – Source : Acsel

Yoyo wallet, entreprise anglaise, s’est spécialisée sur ce segment. En partenariat avec plusieurs enseignes, l’application propose aux utilisateurs de pré-commander dans des restaurants et des commerces. L’utilisateur gagne le temps de la file et des avantages à chaque achat.

Même pari pour Orange Cash. L’opérateur mise notamment sur les remises exclusives fournies ses partenaires pour séduire les utilisateurs. L’opérateur vient également de lancer une offre spéciale jeune qui permet aux parents de gérer jusque 4 comptes pour leurs enfants qui peuvent à leur tour gérer leur argent de poche.

L’application française Lydia a, quant à elle, remporté le prix du Meilleur Service Mobile du 4ème Trophées des Apps le 21 février 2017. Cette solution permet de régler aussi bien ses courses chez des commerçants que de rembourser ses amis ou de créer une cagnotte.

Mais, attention, penser paiement mobile n’est pas uniquement synonyme d’application.

La technologie au service des usages

Parmi les success-story du M-paiement, M-Pesa en Afrique est devenu un cas à part entière. En 2007, au Kenya, Safaricom, filiale de Vodafone, lance sur le marché M-Pesa un système de micro-paiement via un simple téléphone mobile. Près de 10 ans plus tard, M-Pesa compte chaque mois plus de 25 millions d’usagers réguliers à travers le monde et la valeur de la société avoisinerait les 60% du PIB du Kenya.

La clé du succès : M-Pesa est devenue une réelle alternative dans des régions où les personnes ne disposent pas de comptes bancaires et où les distributeurs de billet ne sont pas monnaie courante. Autre avantage, les utilisateurs ont seulement besoin d’un simple téléphone.

Ces solutions permettent de s’adapter à d’autres segments de populations. En France, l’entreprise Atsukè a récemment proposé une nouvelle alternative de paiement mobile à destination du grand public.




Lancé le 6 février 2017 à Rouen, Atsukè est un nouveau dispositif d’achat de ticket de transport via des SMS. Si l’idée peut séduire, la réelle innovation réside dans la simplicité de la formule proposée. L’utilisateur a uniquement besoin d’un téléphone lambda : il envoie un SMS de demande et reçoit en retour un SMS qui vaut comme un ticket, le montant de ce dernier étant directement prélevé sur la facture de son opérateur. Pas besoin d’un smartphone ni de télécharger une application, plus besoin de monnaie non plus dans les bus… de quoi réduire les fraudes !

Cette même solution est également en train d’être adoptée par les associations et ONG pour la collecte de dons.

La start-up canadienne SoundPays se veut être le shazam du paiement mobile. SoundPays propose un mobile wallet par ultrason. Comme pour la technologie NFC, une onde sonore sécurisée communique avec le dispositif de paiement du point de vente. Le plus de SoundPays : un paiement dans des endroits où il n’y a ni réseau ou wifi.

Si aucun acteur n’a réussi à apporter une solution globale, il est clair que les initiatives sont nombreuses. La multiplication des acteurs risque bien de bouleverser le marché notamment en Europe depuis l’adoption de la nouvelle directive PSD2.

Focus sur la PSD2

Le temps est compté pour les organismes bancaires qui ont jusqu’au 13 janvier 2018 pour adopter la nouvelle directive européenne sur les paiements et services PSD2. Avec l’arrivée des Fintech et d’acteurs proposant de nouvelles formes de paiement, cette réglementation vise à ouvrir d’avantage les systèmes de paiement à la concurrence. A bon entendeur, salut.

fintech

La PSD2 autorise la venue de deux nouvelles catégories sur le marché : les AISP (Account Information Service Provider) et les PISP (Payment Initiation Service Provider). Les AISP permettront aux clients de banques d’accéder à leurs informations bancaires sur des solutions en ligne tierce. Les PISP permettront aux clients de donner une autorisation à un site de paiement tiers de débiter directement leur compte.

Les banques devront ainsi ouvrir, via des API, l’accès des données de leurs clients à des tiers, notamment des prestataires de paiement mobile. Les banques devront innover et mettre l’utilisateur au cœur de l’expérience de paiement pour se différencier. Avec Paylib, regroupement de la Banque Postale, la Société Générale, BNP Paribas, le Crédit Agricole, le Crédit Mutuel Arkéa, Boursorama et Hello Bank, les banques espèrent tirer leur épingle du jeu.