Ce jour où l’ attribution a fait irruption dans votre vie 

Comme tout bon digital marketeur, vous avez déjà dû justifier vos investissements d’achats médias auprès de votre direction. Vous aviez vaguement entendu parler de l’ attribution mais cela ne vous avait pas laissé un souvenir impérissable.

Vous avez alors pris votre courage à deux mains (ou votre dir’cli à l’agence à deux bras pour les plus chanceux) et avez dressé consciencieusement un tableau de bord méthodique des résultats par leviers d’acquisition, dessiner des courbes et tirer les conclusions qui s’y prêtaient en termes de performance des canaux.

Très fier de vous, il vous suffisait de quelques fonctions macro bien paramétrées pour voir dessiner vos conclusions et vos projections pour les investissements à venir.

La vie était belle, vous étiez heureux et dormiez sur vos deux oreilles (en réunion).

Oui, mais ça c’était avant, avant que le directeur de la performance vous interpelle vertement en réunion et vous nargue ouvertement « Oui mais tu t’appuies seulement sur un modèle d’ attribution last clic là ? « Tu as pensé à l’ attribution? » « Qu’est-ce que ça donne si tu pars sur un modèle basé sur la position ? Sur un schéma parabolique par exemple »… tous les regards se sont alors tournés vers vous puis s’en est suivi un silence gêné .

Vous auriez alors voulu trouver une répartie cinglante mais tout ce qui est sorti de votre bouche était un simple « je vais regarder».

Bien décidé à ne pas en rester là, et à parfaitement maîtriser toutes les subtilités de l’attribution pour votre prochaine réunion, tel un élève de terminal, vous vous êtes décidé à bachoter toutes les nouvelles façons de définir vos investissements.

Analyse de la contribution, attribution… what else ?

Après avoir épluché toutes les SERP Google sur le sujet, vous commencez à y voir plus clair.
Alors l’attribution selon la définition consacrée c’est :
« une méthode d’analyse qui consiste à pondérer le résultat d’un objectif de conversion aux canaux marketing ayant directement ou indirectement contribué » .
Bon, jusqu’ici tout va bien. Effectivement, lorsqu’on y réfléchit, c’est logique : suivant les secteurs d’activité, un parcours d’achat en ligne peut être plus ou moins long.
Alors pour commencer à réfléchir à de l’attribution, il faut tout d’abord analyser la contribution, c’est à dire, décrypter les interactions entre les différents canaux.
Le chemin qui mène à la conversion peut donc être alimenté par différents leviers d’acquisition.
On décompose généralement le parcours d’achat en trois étapes :
  1. L’attention : l’internaute découvre et s’intéresse au produit/offre
  2. La considération : l’internaute analyse et compare le produit/l’offre
  3. La décision : l’internaute finalise son achat
Chaque levier participe alors à une étape du parcours et à affiner l’entonnoir de conversion.
Définir une méthode d’attribution est particulièrement utile lorsque l’internaute a multiplié ses visites sur le site avant l’acte d’achat (ou demande de lead), cela permet ainsi d’envisager le poids qu’a joué chaque levier dans l’acte de conversion.
Si le nombre de points de contact moyens est proche de 1, il est inutile d’envisager de mettre en place une méthode d’attribution.

Avant, j’attribuais ma conversion au last clic, mais ça, c’était avant !

Le monde merveilleux de l’attribution vient de s’ouvrir à vous avec ses multiples méthodes de calculs et ses tableaux Excel à macros.
Il vous faut maintenant choisir une méthode de contribution à adopter et l’appliquer systématiquement.
Vous faites alors rapidement l’inventaire des méthodes applicables :
Schéma last clic

Modèle d’attribution au last clic

Last clic : celle-là, vous la connaissez par coeur; attribuer la conversion au dernier levier.

Ca fonctionne si : vous avez des cycles d’achat courts, peu d’interactions et un panier moyen faible.

First clic : L’autre modèle simple !  C’est le 1er canal qui prime, il permet d’identifier le canal qui génère les 1ers volumes et qui contribue à la notoriété.

Modèle idéal pour les annonceurs avec cycle d’achat long.

Le linéaire : Cette méthode part du principe que tous les leviers contribuent à la conversion et qu’ils ont un poids similaire.

Le modèle U : le premier  et le dernier canal sont les plus importants. On leur attribue généralement 40 % de la conversion à chacun.

Tout ce qui se passe entre le first et le last clic se partage de manière égale 20 % de la conversion.

Modèle idéal pour les annonceurs avec cycle d’achat long qui accorde de l’importance particulièrement à la première et dernière phase du cycle d’achat.
Vous découvrez également qu’il existe d’autres modèles d’attribution plus orientés data driven basés sur la chaine de Markov, qui permettent de calculer grâce à un système de probabilité le poids de chaque levier dans la conversion, mais cela fera l’objet d’une étude plus approfondie.

L’ attribution c’est bien, l’optimisation du bénéfice c’est mieux..

Ça y’est ! Vous le tenez, vous avez réussi à comprendre les différentes méthodes d’attribution et leurs utilités.
Vous êtes donc fin prêt pour passer à l’étape suivante :
« Optimiser votre bénéfice en fonction de l’investissement : calculer plus pour gagner plus. »

Ce moment où vous avez décidé d’adopter un data scientist…

Plutôt fier de vous, vous présentez votre nouvelle méthode de calcul de l’investissement en réunion et le data scientist s’exclame : « Regarde, c’est cool ce qu’on fait avec les dérivés pour trouver le minimum de la fonction concave »…
Vous lui lancez un regard digne d’une poule ayant trouvé un appareil dentaire.

Vous n’avez qu’une envie : retourner à vos bonnes vieilles matrices excel bien connues mais trop tard, il est lancé, vous ne pouvez plus faire marche arrière (le data scientist peut être susceptible), vous décidez de l’écouter.
Si on enlève les gros mots, les concepts mathématiques complexes, il est tout à fait possible de comprendre la démarche qui se cache derrière ces concepts obscurs.

De la décomposition de la série temporelle à l’ attribution…

Alors, commençons par la décomposition de la série temporelle.
Voici à quoi peut ressembler une courbe des ventes au cours du temps :
Comment le data scientist voit cette courbe ? Il est bizarre, mais quand il voit ça, il voit plusieurs choses.
La première chose, ce sont ces pics réguliers. Bon, il ne vous apprend rien, comme tout bon digital marketeur, vous savez qu’il y a des pics de saisonnalité. Mais alors à quoi servent-ils ?
Il vous suggère d’utiliser le modèle mathématique ARIMA, vous cela vous évoque plus le nom du dernier cocktail à la mode qu’une façon de calculer vos investissements mais il insiste pour vous expliquer, c’est en fait ainsi qu’il arrive à déterminer la structure de ces pics et la périodicité :

attribution-décomposition-saisonnalité

Bon, c’est pas trop mal… Mais là, le type ajoute même qu’il va décomposer la tendance générale grâce à son modèle ARIMA. Oui… des mots compliqués pour expliquer que le fruit de votre travail sur le site porte ses fruits et que la marque est de plus en plus connue.

Jusque là, c’est toujours clair. Peu importe ce qu’il a fait, ça a du sens. Et là, il vous lâche : « Ce qui m’intéresse, c’est le reste, ce que le modèle n’explique pas ! »

Pour faire simple, pendant les pics de saisonnalité, même si l’investissement AdWords est 0, il y aura quand même plus de ventes que lors des périodes creuses. Les variations des ventes qui suivent les pics de saisonnalité sont en fait les fruits de votre campagne d’acquisition, une sorte de retombées vertueuses.
Vous êtes convaincu par son argumentaire et vous croyez en lui. De toute façon, arrivé à ce stade, il n’y a que lui qui sait où il va…
Mais, quel est le lien avec l’attribution ?

Il prend ces données non expliquées, mois par mois, il utilise un modèle d’attribution (le modèle U), il obtient la contribution de chacun des canaux pour chaque mois, non pas sur les ventes réellement observées, mais sur ces données non expliquées.
Ah oui, ça vous parait clair maintenant !
Ces fameuses données et variations inexpliquées sont en fait le fruit de votre travail acharné et l’accumulation des résultats des différents leviers d’acquisition.
Par exemple, sur 100 ventes observées, 40 sont dues à AdWords, 30 au SEO, 20 au direct etc…
Mais surtout, il peut appliquer ce modèle à chaque résultat de ventes et donc trouver combien chaque canal a rapporté !

Le modèle Emax ou le lien entre le revenu et l’investissement…

Au final, si on résume par mois, on obtient un nombre de ventes pour chaque canal (basé sur l’ attribution) qu’on peut mettre en liaison avec le montant investi dans les campagnes. Il vous parait évident que si on augmente ces investissements, les ventes seront plus nombreuses et le CA va augmenter, mais dans quelles proportions ?
Ne vous inquiétez pas, le data scientist a encore un modèle barbare qui va modéliser ceci.
Et c’est « évident » pour vous, il choisi un modèle Emax car c’est un modèle flexible et robuste dont la forme est adaptée à ce type de problème.
« Hum… finalement, pourquoi pas, une droite c’est peut être un petit peu trop simple… Si on fait un investissement infini, on n’aura pas un nombre de ventes infini »
Il applique ce modèle pour chaque canal et arrive à résumer son travail avec ce petit graph tout simple :
on investit plus en flux-cpc qu’en organic mais l’organic génère un CA plus important. Il va donc falloir diminuer le flux-cpc et augmenter l’investissement organic, mais dans quelle proportion ?

L’optimisation de l’investissement…

Vous êtes toujours là ? C’est bon signe, on a bientôt fini et on rentre dans la partie intéressante. Il est simple de dire qu’il faut diminuer certains canaux et en augmenter d’autres. Cela s’appelle en terme de data scientist une optimisation couplée aux dérivées de ce modèle Emax.
Encore une fois, c’est rassurant ! Les résultats semblent cohérents avec votre ressenti de digital marketeur hors paire, mais cette fois, c’est supposé être optimal et justifié mathématiquement.
Ca y’est, on est enfin arrivé au bout ! On a enfin la répartition de notre budget sur chaque canal ! VICTOIRE !
Comme tout bon data scientist, il vous arrête et vous pose la question: « Attends, tu as ta répartition optimale, mais tu ne veux pas savoir le budget maximal que tu peux utiliser ? Si ça se trouve, en augmentant ton budget, tu augmenteras bien plus ton chiffre d’affaires estimé »

Et c’est là, que basé sur cette répartition optimale, il fait simplement varier l’investissement global et peut estimer le montant généré en fonction de l’investissement global. Pour vérifier que le gain est plus grand que l’investissement, il va mettre vous faire du CA généré – l’investissement en fonction de l’investissement.
Quand la courbe s’infléchit, l’investissement global est optimisé !!!
Vous êtes désormais fin prêt pour aborder le prochain comité de direction avec votre proposition d’investissement optimisé dans une main et votre décomposition de la série temporelle dans l’autre…
Vous garderez tout de même le data scientist dans l’oreillette pour vous souffler quelques réponses parce qu’au niveau modèle ARIMA vous n’êtes pas sur de ne pas flancher. Et oui, faire parler les chiffres, c’est un métier.

Merci à David Guede pour sa participation plus vraie que nature dans le rôle du data scientist: 
Sources : 
https://support.google.com/analytics/answer/1662518?hl=fr