Secteur du luxe : des exemples de digitalisation

La digitalisation du luxe s’est fait attendre… En effet, il a souvent été dit que luxe et digital ne faisait pas bon ménage, car à priori tout opposait ces 2 univers.

Le luxe vide l’élitisme, la rareté, l’intemporalité, alors que le digital évoque l’universalisme, la profusion, l’instantanéité.

Et pourtant, bien que le luxe ait entamé sa mutation plus tardivement que les autres secteurs, la digitalisation du luxe est bien enclenchée.

Voici quelques exemples d’appropriation du digital par le luxe…

 

1- Les Hackathons :

 

  •  « Unlock the Future of Luxury » & « Unlock Supply Chain »

 

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Ces dernières années, le groupe LVMH met les bouchées double en matière de digitalisation. Les 25,26,27 septembre 2015, LVMH lançait son Hackathon Unlock the Future of Luxury. L’évènement a eu lieu dans les Ateliers de Louis Vuitton à Asnières. Parmi 400 candidatures reçues, 58 développeurs ont été sélectionnés pour participer à cet évènement. La moitié d’entre eux était des étudiants issus d’écoles prestigieuses : Polytechnique, Centrale, Télécom, Dauphine en France, mais aussi de la Queen Mary University de Londres.

L’objectif : développer en 48h une application innovante à l’aide d’algorithmes prédictifs, de machine learning, d’intelligence artificielle, afin de permettre à Louis Vuitton de mieux connaître ses clients, les tendances et d’anticiper l’évolution du luxe. Un jury composé de professionnels du Big Data, de Louis Vuitton et des partenaires de évènement récompensait le meilleur projet par un voyage à San Francisco et une dotation de 8 000 euros.

Fort du succès de son 1er hackathon, LVMH lance en 2016 la seconde édition, Unlock Supply Chain. Il a eu lieu les 17,18,19 juin 2016 à l’Ecole 42, en partenariat avec l’entreprise innovante Anaplan. Gratuit et ouvert à tous, une cinquantaine de participants, développeurs, data analystes, architectes ou encore designer.

L’objectif, toujours en 48h, était d’inventer des applications inédites pour améliorer la gestion de la supply chain en proposant une application connectée en temps réel (gestion des stock et service client) à partir de données brutes et d’une plateforme de planification déjà existante.

Voici l’interview de Vincent Barale, directeur Supply Chain de LVMH au sujet du hackathon Unlock Supply Chain (désolée pour la mauvaise qualité du son…) :

 




 

 

  • Hackathon “Hackers on the Runaway”

 

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Hackathon organisé par l’incubateur TheFamily.

 En 2014, Hackers on the Runway, se penche sur l’avenir du luxe dans un monde qui se digitalise. L’évènement, organisé par l’incubateur The Family, a réuni plus de 200 acteurs du monde du luxe (dont des représentants de Dior et de Chanel) ainsi que des acteurs influents dans le monde du digital (dont Seth Godin, ancien responsable du marketing direct chez Yahoo) avec des mentors, des start-up et un fablab afin d’échanger sur la digitalisation du secteur du luxe et les nouveaux liens qui les unissent.

L’objectif : guider une industrie encore réticente au changement, qui s’appuie parfois trop sur la force de ses marques et sur sa renommée, vers la disruption du numérique.

 

2- Collaboration avec des start-up/pure-players :

 

La digitalisation des marques de luxe passe également par des montages financiers stratégiques avec des start-up ou des pure-players.

 

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  • La joint venture Yoox/Kering (2012)

 

Le groupe Kering s’appuie sur l’expertise du leader du luxe en ligne Yook pour la gestion des boutiques en ligne de 6 de ses marques : Alexander McQueen, Balenciaga, Bottega Veneta, Saint Laurent, Sergio Rossi et  Stella McCartney. A travers la joint-venture, YOOX a mis à la disposition des marques de luxe de Kering. Le groupe français de luxe Kering, souhaitant accélérer ses ventes de sacs et autres produits de luxe en ligne, détiendra 51% du capital de l’italien leader du luxe en ligne Yoox. Cette joint-venture permettra au groupe Kering d’avoir accès à la plateforme technologique dédiée au e-commerce du luxe et de son savoir-faire dans le e-commerce, mais également de bénéficier de l’envergure internationale (notamment en Chine) acquis par Yoox.

 

  • Le rachat de Net-A-Porter par le groupe Richemont (2015)

 

Le groupe Richemont rachète le site de vente en ligne Net-A-Porter (93% de son capital) pour monter des opérations exclusives avec certaines de ses marques -Chloé, Cartier, Dunhill…-  sur un site qui distribue déjà des marques telles que Stella Mc Cartney, Jimmy Choo, Burberry ou Givenchy. Richemont prend ainsi solidement pied dans l’e-commerce, un marché sur lequel les marques de luxe sont en retard.

 

  • Yoox rachète Net-A-Porter (2015) 

 

Ce rachat prendra la forme d’un échange d’actions, à l’issue duquel Richemont possédera 50% de l’entité issue de la fusion et ne détiendra que 25% des voix, pour en préserver l’indépendance.  Très bel actif, Net-a-Porter n’était pas stratégique pour Richemont, qui désirait néanmoins protéger sa pépite face à l’arrivée dans l’univers du luxe de géants tels qu’Amazon

 

  • LVMH rentre au capital de la start-up Moda opérandi, (juin 2012)

La start-up Moda Operandi est la seule boutique en ligne à proposer la pré-commande des modèles vus dans les défilés. 

LVMH, qui a investi 36 millions de dollars, a vu une opportunité de vendre des articles en ligne beaucoup plus qualitativement que via des ventes privées ou autres vente évènement au rabais.

 

 

3- Le e-commerce :

 

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Home page du site e-commerce 24 sèvres- Lancement le 6 juin 2017

Lancement le 6 juin prochain du site de e-commerce par LVMH de « 24 sèvres » (en référence à l’adresse « physique » du Bon Marché). Ce site veut se différencier des places de marché comme Net-a-Porter, Yoox, MyTheresa, Matchesfashion.com ou LuisaViaRoma. Il proposera 150 marques de luxe dont 15 issues du groupe LVMH et Gucci du groupe Kering. Chanel et Hermes ont refusé de participer à cette aventure, car ces derniers travaillent actuellement sur leur propre stratégie digitale.

Après un essai infructueux en 2010 du site eluxury, le groupe de Bernard Arnault fait ce nouveau pari en confiant ce projet à une start-up intégrée en interne « car c’est en interne que sont le mieux connues les attentes de nos clients ». Jusque-là, le leader du luxe avait une approche décentralisée.

 

4- Parcours client augmenté – personnalisation de l’expérience client :

 

Le luxe doit se différencier des sites marchands traditionnels et s’efforcer de ressembler à «un écrin au service des collections magnifiées» dixit Michel Campan, créateur de l’agence digitale Same Same, spécialisée dans le luxe.

 

Ses internautes doivent se sentir comme ultra privilégiés,  se voyant proposer des modèles exclusifs, des produits en avant-première ainsi que des objets personnalisés tout en offrant, toujours, des services impeccables : produit enveloppé dans du papier de soie, glissé dans des boîtes siglées, livré à domicile par coursier. Kering fait de l’enrichissement de l’expérience client dans les boutiques en ligne, un des axes prioritaires de sa stratégie numérique.

 

5- La formation des salariés :

 

Logo-Kering-Digital-AcademyKering (ex PPR) met en place plusieurs actions de digitalisation et lance en 2011, la « Digital Academy« , le programme était au départ pilote et devait durer deux ans  qui a permis à près de 400 personnes en interne, de se former au digital. Dans un premier temps, ce sont les top managers qui en ont bénéficié: les présidents des marques et le comité exécutif de PPR, les cadres dirigeants, managers clés et experts du digital. Face au retour extrêmement positif, ce programme s’ouvre désormais aux nouveaux collaborateurs, aux DRH mais aussi aux directeurs de magasins.

Au programme :

  • des stages
  • des voyages d’étude auprès d’acteurs tels que Rakuten (numéro un du commerce en ligne au Japon) à Tokyo, Google à Londres, des déplacements à Hongkong, Boston, New York, Paris ou Milan
  • des journées de formations à travers plus de 40 sessions
  • des travaux en ateliers portaient sur la stratégie des marques en ligne, les indicateurs de performance du digital, ….
  • un Intranet dédié permettait aux participants de partager les bonnes pratiques et les retours d’expérience.

La «Digital Academy» a contribué à décloisonner les fonctions, elle est aussi une première par l’ampleur de la mobilisation autour d’un projet commun.

 

La digitalisation du luxe est bien en marche. Les acteurs historiques inventent, testent et s’approprient leurs propres codes et tout laisse à penser que ce secteur n’a pas fini de nous faire rêver…