L’année 2019 a été marquée par la crise des Gillets Jaunes. Après de longs mois dans la rue, une des revendications phares a été la mise en place d’un RIC (referendum d’initiative citoyenne). L’idée est de mettre en place un outil de démocratie directe où les citoyens seraient force de proportion législative.

Dans cette même logique, les modèles de concertation se multiplient à toutes les échelles. Que ce soit par la mise en place du Grand Débat National ou encore concernant la privatisation d’ADP.

Quel meilleur moyen de concertation, mais surtout d’analyse des données récoltées que le numérique ?  Qui n’a jamais reçu une demande pour signer une pétition en ligne  ?

Quand on fusionne citoyenneté et technologie, cela donne l’écosystème des CivicTech.

 

Mais qu’est-ce qu’une CivicTech ?  

Depuis quelques années émerge un tas de nouveaux acronymes participant au processus de disruption de tous les secteurs d’activités. Après les FinTech, l’EdTech, la TechForGood, MedTech et j’en passe, nous avons maintenant les CivicTech.

Les CivicTech peuvent prendre différentes formes comme des applications mobiles ou des sites web. L’objectif commun est l’engagement des citoyens sous différentes formes :

  • Signalements citoyens,
  • Crowdsourcing,
  • Sondages en ligne,
  • Pétitions,
  • Cartographies participatives,
  • Consultations,
  • Budgets participatifs,

Ces formes de participation peuvent émerger des pouvoirs publics comme de la société civile. La mise en place de ces outils induit la volonté de partager le pouvoir en incluant les citoyens dans la construction des politiques publiques.

Au sein des CivicTech, nous pouvons distinguer des sous-catégories à ne pas confondre. Par exemple, nous pouvons définir les politech comme étant toutes les technologies à visée électorale. Ces outils permettent de cibler des électeurs indécis en personnalisant les messages adressés par les partis. Contrairement aux gouvtech qui englobent les outils mis en place par les pouvoirs publics pour améliorer leurs fonctionnements ou la transparence des politiques publiques.

fonction-civic-tech

Source : https://www.urenio.org/2013/12/06/emergence-civic-tech/

 

À l’aune d’un état d’esprit totalement orienté customer centric, où il est inenvisageable de proposer un produit commercial sans prendre en compte l’avis des consommateurs. Il est impossible de gouverner sans prendre en compte l’avis des citoyens.

Vous allez me dire que nous sommes en démocratie. Notre système repose déjà sur un principe de participation à des élections pour élire des représentants.

Justement, les CivicTech entrent en jeu afin d’orienter notre société de la représentation vers celle de la participation directe de tous les instants.

 

Quels sont les bénéfices apportés par les CivicTech ?

  • Elles permettent la participation à un plus grand nombre d’individus.
  • Elles peuvent clarifier les données publiques afin de faciliter la transparence sur des points clés comme les dépenses publiques.
  • Par la participation citoyenne, les CivicTech permettent de coconstruire les actions de l’État et les faire évoluer au plus proche des besoins des citoyens.
  • Elles favorisent la réactivité en accélérant les processus de changement législatif.

Ces technologies posent de nombreuses questions. À savoir, quel effet peut avoir ces dispositifs sur les processus politiques traditionnels ? Et comment toucher le plus de citoyens pour obtenir une représentation réelle avec une société aussi diverse qu’est la société française ?

 

Quelles sont les limites de ce modèle ?

 

On est face à un paradoxe. La mise en place d’un débat démocratique nécessite une transparence en garantissant la véracité des données récoltés et donc la participation tout en préservant l’anonymat.

Dans le cadre d’une pétition, beaucoup de personnes veulent participer, mais ne veulent pas que leur nom apparaisse.  Cela peut freiner la participation.

71% des personnes interrogées se disent vigilantes quant à la gestion de leurs données personnelles, dont 30% de « très vigilants ». 21% citent la méfiance vis-à-vis de l’accès à leurs données comme une raison de ne pas participer. 10% ont peur de la diffusion d’opinions personnelles qui stoppe la participation.

Source : https://linc.cnil.fr/fr/barometre-linc-2019-participation-en-ligne-et-donnees-personnelles-entre-meconnaissance-et-vigilance

 

D’autre part, la dématérialisation a mis de côté une grande partie de la population française qui n’a pas encore intégré les nouvelles technologies dans leur quotidien. Une inégalité forte qui exclut une grande partie de la population française. La technologie par essence n’est pas neutre. Elle sélectionne ses utilisateurs seulement par la capacité de pouvoir les utiliser.

  • Un internaute français sur deux déclare avoir déjà participé à une consultation en ligne – dont 58% des 65 ans et plus.
  • La participation s’établit à 40% pour la seule année 2019, montrant que le geste politique et citoyen sur ces plateformes dédiées entre tout doucement dans les pratiques.
  • 21% des non-participants expliquent ne pas le faire, car ils ne sont pas au courant de tels processus en ligne et 19% les trouvent inutiles.

Source : https://linc.cnil.fr/barometre-linc-2019-participation-en-ligne-et-donnees-personnelles-entre-meconnaissance-et-vigilance

 

Qu’est-ce qu’une bonne CivicTech ?

  1. Dans le champ des concertations, plusieurs critères sont nécessaires pour aboutir à un processus pertinent. La plateforme doit respecter ces étapes : Problématisation -> Propositions de solutions collectives -> Vote -> Mise en action.
  2. Les CivicTech ne doivent pas se dissocier des démarches physiques. Elles doivent être complémentaires, à l’image du plus emblématique dispositif de CivicTech qu’est le Grand Débat National de 2019. L’État a déployé une plateforme en ligne à l’échelle de la France en plus de réunions publiques à l’échelle locale afin de relayer la démarche sur le terrain.
  3. Les outils de CivicTech ne doivent pas être à la recherche exclusivement de participations. Ce qui compte ce sont les collectes d’idées ou de solutions en lien avec une réelle problématique.
  4. L’enjeu de la transparence est essentiel pour garantir l’honnêteté des outils. La possibilité de consulter le code source est un prérequis pour assurer de la sincérité des outils.

 

Dans une société en tension permanente, les outils digitaux ont un vrai rôle à jouer pour désamorcer les crises sociales. Nous sommes face à un phénomène de fond ou la crise de la représentativité fait émerger des solutions innovantes pouvant apporter une réelle solution dans une société où les citoyens sont de plus en plus exigents.

Le citoyen et le consommateur sont les mêmes personnes. Il est devenu prioritaire d’être focus sur les besoins des citoyens afin d’apporter des réponses adaptés et ne pas donner le sentiment de penser à leur place.

 

Ci-dessous, une cartographie des CivicTech

cartographie-civic-tech

Source : https://www.deciderensemble.com/articles/47158-etude-cartographie-de-la-civic-tech-en-france

 

Sources :

http://civictechno.fr/2017/07/17/manifeste-civic-tech-pour-une-democratie-deliberative/

https://www.deciderensemble.com/articles/45556-entretien-specificites-de-la-civic-tech-francaise

https://linc.cnil.fr/barometre-linc-2019-participation-en-ligne-et-donnees-personnelles-entre-meconnaissance-et-vigilance

https://linc.cnil.fr/les-civic-tech-bousculent-elles-vraiment-la-democratie

https://linc.cnil.fr/civic-tech-donnees-et-demos-le-cahier-ip7-explore-les-liens-entre-democratie-et-technologies