L’intelligence artificielle appliquée à la production de vêtements va devenir un outil très efficace. Un des  facteurs clés de succès pour une usine de production de vêtements est l’efficience. Celle-ci peut-être grandement améliorée par des outils digitaux qui optimisent les différentes opérations de productions et donnent plus de visibilité sur la performance réelle de l’outil de production.

Cependant, l’interprétation, l’analyse et l’utilisation des données collectées sont complexe car le volume à traiter est énorme. Chaque étape de la réalisation d’un vêtement est liée à plusieurs autres et l’interdépendance ainsi créée génère un nombre de possibilités astronomique.

Afin de résoudre la problématique liée à l’analyse de ces données, à la mise en place d’action corrective ou d’optimisation aux vues des historiques, voire d’anticipation, l’intelligence artificielle appliquée à la production de vêtements est une vraie solution. Elle permettra de réaliser des avancées significatives dans les domaines suivants:

  • Amélioration de la qualité et réductions des déchets liés à la production.
  • Optimisation de l’efficience et de l’agilité de l’outil de production.
  • Prévision et anticipation des évolutions en terme de typologies de produits

L’intelligence artificielle et production de vêtement : Pourquoi ?

L’intelligence artificielle appliquée à la production de vêtements n’est pas encore réellement utilisée. Mais l’avenir est prometteur. Certains think tank commencent à se mettre en place afin de développer des techniques permettant de passer une nouvelle étape dans l’optimisation de la production.

C’est, par exemple, le cas de R3ilab et le programme TEX-IA qui aide les entreprises françaises à aller vers la production 4.0 assistée par l’intelligence artificielle. Cela passera par un ajustement en temps réel de la production à la demande selon Mr Daniel HARARI PDG de LECTRA.

Actuellement, le business model est basé sur une production de masse communiquée à l’avance par les donneurs d’ordres. On commence déjà à atteindre les limites de ce système car la profondeur des séries à tendance à se réduire. Du coup, les frais fixes explosent et la rentabilité est menacée. D’ici une décennie, l’outil industriel aura dû s’adapter à cette nouvelle demande. Les PME ont un atout par rapport aux grands groupes. Elles sont plus agiles et les investissements sont proportionnels à la taille de l’entreprise. Il faut également prendre en compte le ROI mais il sera nécessaire de s’adapter pour survivre. Face à tous ces changements qui demandent une analyse pointue d’un volume de datas important, l’intelligence artificielle va permettre d’automatiser cette étape et ainsi de rendre plus agile l’outil de production.

L’intelligence artificielle et production de vêtement : L’amélioration de la qualité et la réduction des déchets :

L’intelligence artificielle améliore la qualité :

Contrôle qualité des vêtements

Tout au long du processus de fabrication d’un vêtement, de nombreuses étapes de contrôle sont misent en place afin de détecter des erreurs/anomalies qui rendraient le produit final impropre à la mise sur le marché. Toutes ces étapes de contrôle sont, aujourd’hui, réalisées par des hommes (et donc faillibles). Dans ce domaine, l’intelligence artificielle peut apporter une plus value importante.

Aujourd’hui, les deux premières étapes de la production d’un vêtement que sont la filature et le tricotage/tissage sont déjà très largement automatisées. Cependant, lorsqu’un problème survient (fil qui casse, erreur lors du tricotage/tissage), c’est un opérateur qui vient résoudre le problème. La qualité du fil ou du tricot/tissu dépendra donc directement de la qualité de cette intervention manuelle.

De nouveaux systèmes automatisés ont vue le jour afin de réduire l’incidence de la qualité d’un travail manuel sur ces opérations. Seulement, la machine, en résolvant le problème, peut en créer un autre. Pour mieux comprendre, lors de la filature, si un fil casse, la machine réparera automatiquement le fil mais il n’est pas dit que cette réparation ne pose pas de nouveau un problème lors de l’étape de fabrication suivante. Cela va dépendre d’un grand nombre de facteurs comme la finesse du fil et du support réalisé à partir de ce fil, le niveau de qualité exigé par le client, la tension de tricotage, le type de support textile réalisé, la machine employée etc… On voit donc que pour un même fil, en fonction de son utilisation et de paramètres exogènes (cahier des charges du client) on va générer une multitude de paramètre dont il faudra tenir compte uniquement pour réaliser une petite réparation. Si vous multipliez cela par la diversité de fil réalisable, et le type de produit confectionné vous obtenez un nombre de possibilités ingérables humainement.

C’est ici que l’intelligence artificielle rentre en jeux. D’un point de vue qualitatif, plus la data est précise et abondante, plus l’aide apportée par l’IA sera bonne. On peut citer, comme exemple de partenariat dans ce domaine, le filateur et teinturier de Tourcoing UTT Yarn qui, en partenariat avec la société TLG pro travaille sur un système permettant d’optimiser la filature. Ce système prédictif intègre l’ensemble des données de filature collectées par la société sur ces dernières années pour en sortir un modèle permettant de rapprocher au plus près chaque production des demandes du client. Cet outil permettra également de flexibiliser l’outil de production en analysant les tendances du marché. Cela permettra de proposer un catalogue produit en concordance avec les évolutions futures de consommation.

L’intelligence artificielle appliquée à la production de vêtements à également un grand rôle à jouer lors de la réception des tissus dans l’usine de confection. Aujourd’hui, dans plus de 95% des sites, le contrôle se fait visuellement par des opérateurs qui font défiler les rouleaux de tissus sur des tables rétro éclairées de façon à détecter plus facilement les défauts du support inspecté. Pour avoir observé ce contrôle à de très nombreuses reprises, il est loin d’être parfait. C’est typiquement le cas de figure ou l’automatisation du contrôle lié à de l’IA permettrait d’améliorer sensiblement ces résultats. C’est, par exemple, le cas de la plateforme COGNEX qui propose le système VIDI associant un système de contrôle visuel (caméra) à du Deep Learning.

L’alliance de la l’automatisation et de l’intelligence artificielle permet de prendre en compte des scénarios qui ne peuvent être écris à l’avance, soit parce qu’ils semblent peu probables, soit car ils sont trop nombreux et dépendent de trop de facteurs, soit parce qu’on ne les connais pas à l’avance. Dans le textile, il n’y a rien qui ressemble moins à un type de défaut qu’un autre type de défaut. Il est quasi impossible de tous les répertorier de façon réellement exhaustive. Le deep Learning permet de ne pas avoir à faire face à ce problème. Grâce à des réseaux de neurones artificiels, il va, dans un premier temps, apprendre les défauts déjà répertoriés par l’opérateur, en général, en analysant des photos de produits (supports textiles mais aussi vêtements finis) acceptés et refusés. Plus les exemples sont nombreux, plus la machine apprend vite. De plus, pour chaque nouveau produit, il suffit d’intégrer de nouvelles images correspondant à ce produit dans la base de donnée et le tour est joué.

Voici un exemple en image de ce que ce type de système est capable de détecter :

Qualité et intelligence artificielle

Lors de l’inspection d’un tissu, il est possible de détecter les défauts liés au tissage. Grâce à l’acquisition d’une base de données images, le système d’intelligence artificielle couplé à un système optique (caméra la plupart du temps) va détecter les défauts générées lors du tissage/tricotage ou même de la filature (grosseur sur un fil, fibre étrangère de coloris contrasté…) Le système va, de lui même classifier les supports textiles en défectueux et acceptés. Plus besoin de contrôle humain une fois que la machine a appris. De plus, pas d’interruption et une vitesse d’observation pouvant être multiplié par 5. Donc gain de temps sur une opération non directement productive.

Tout type de défauts peut être répertorié et on peut ainsi générer un spectre de contrôle très large. Ceci pour tout type de support et quelque soit le stade de production. On peut donc travailler sur un support, une pièce coupée, une impression, une broderie, une couture, un produit fini. Tout est techniquement possible.

L’intelligence artificielle réduit les déchets :

intelligence artificielle réduit les déchets

 

L’intelligence artificielle appliquée à la production de vêtements rend processus de contrôle à la fois plus sûr et plus rapide. Elle optimise l’emploi matière car les défauts sont détectés de façon plus précoce dans la chaîne de production. La fabrication mondiale d’article textile représentait, en 2018, 111 millions de tonnes de fibre (source textile-network.com). 12 à 15 % de ces fibres finissent en déchets. On peut donc estimer qu’entre 13 et 16,6 millions de tonnes de fibres sont “gaspillées” chaque année par la production de vêtements.

Des chercheurs et industriels ont développé de nombreuses techniques de recyclages. Mais, les efforts n’ont pas réellement été concentrés sur la source du problème : la mise en place du système pour améliorer la qualité de production. Plus un défaut est détecté tôt dans un processus de fabrication, plus celui-ci à de chance d’être récupéré et moins son impact écologique sera important.

Si le défaut vient d’un fil, en le détectant immédiatement, l’impact ne portera que sur les quelques cm de fil enlevés avant et après le défaut. Si ce défaut passe l’étape de la filature et arrive en tricotage ou tissage, il faudra supprimer les quelques cm de tissu ou de tricot réalisés avant et après le défaut. On peut continuer comme cela jusqu’au produit fini qui part en défectueux. Dans ce cas, c’est plusieurs centaines de grammes de fil qui partent à la poubelle. Et s’il s’agit d’un problème récurrent, on peut, dans des cas extrêmes arriver à plusieurs tonnes de gaspillages.

L’automatisation permet déjà de réduire ce problème mais l’IA permet de passer au stade supérieur en optimisant chaque processus et le contrôle qui va avec.

L’intelligence artificielle et production de vêtements : Optimisation de l’efficience et de l’agilité de l’outil de production :

l'intelligence artificielle optimise la production

En automatisant l’ensemble des étapes de production ainsi que la manutention des différentes pièces composant le produit fini, on améliore le processus de fabrication en terme de rapidité d’exécution et d’atteinte d’un niveau de qualité optimal. Cependant  l’usine présentée en vidéo dans ce lien va encore plus loin. Avec un système de collecte centralisé de la donnée, l’intelligence artificielle va définir le mode opératoire optimal pour fabriquer les différents produits en analysant l’ensemble des datas. Cela permettra

  • De définir le trajet optimal de fabrication dans l’usine (quel type de contrôle appliquer, quel type de coupe réaliser, quel trajet effectuer dans l’atelier de confection, quel position dans l’entrepôt de stockage, quand préparer les pièces à l’expédition)
  • D’anticiper le passage des différentes pièces dans chaque atelier en déclenchant les mises en production à moment le plus opportun par rapport à la charge des ateliers et à la date d’expédition en tenant compte du temps global de production.
  • De prendre en compte les données exogènes à l’usine comme le statut de production des sous traitants, les cahiers des charges des clients. C’est un point crucial car cela permettra d’adapter, en temps réel, l’outil de production aux évènements extérieurs.

Il est évident qu’une telle usine représentent des investissements de plusieurs millions d’€. Il est donc indispensable, pour pouvoir rentabiliser un tel outil de production, de traiter des quantités élevées. Cependant, la grande différence par rapport à une importante unité de production classique c’est qu’ici nous parlons en volume global et plus en quantité par commande. En effet, si une usine classique à une capacité de production de plusieurs millions de pièces par mois, du fait de sa structure et afin d’atteindre un seuil de rentabilité acceptable (de l’ordre de 3 à 4%) et à rester attractif d’un point de vue prix, elle ne pourra traiter que de grosses commandes (supérieures à 10 000 pièces par modèle).

Une usine de même capacité de production mais fortement automatisée et faisant appel à l’AI aura la capacité de traiter de plus petites commandes (à partir de 2 000 pièces) en gardant un seuil de rentabilité acceptable tout en proposant un prix dans le marché.

L’intelligence artificielle et production de vêtements : Prévisions et anticipation :

l'intelligence artificielle et les prévisions

Les entreprises de la fabrication de vêtements possèdent ou sont susceptibles de posséder, pour la plupart d’entre elle, un grand nombre de données relatives aux différentes étapes de productions. Avec l’IA et du data mining, il devient possible de déterminer précisément quels sont les types de produits pouvant générer la marge la plus importante. C’est, par exemple le projet qui est entrain de se mettre en place entre le spécialiste du linge de maison GARNIER THIEBAUT et la société BRAINCUBE. Grâce à l’analyse poussée basée sur l’ensemble des informations disponibles de production (coûts, marge générée, ROI) il devient possible de définir une stratégie mettant en avant les différents métiers de l’entreprise. Avec cette vision, et en fonction de l’évolution de l’historique des commandes, on peut définir, en intégrant de l’IA la courbe de vie industrielle des différents produits ou type de produits du catalogue et ainsi faire évoluer l’outil industriel dans le sens du marché.

L’intelligence artificielle et production de vêtements : Conclusion :

Illustration intelligence artificielle

 

On commence à voir apparaitre des applications IA spécifiquement conçues pour l’industrie de l’habillement. Cependant le marché n’est pas encore développé et le nombre de cas d’utilisation  et de fournisseurs de tels systèmes est encore assez faible si l’on compare à d’autres secteurs d’industries manufacturières et surtout à l’industrie lourde.

Aujourd’hui, la plupart des applications pour le textile et l’habillement existantes sont principalement cantonnées au contrôle et à la vision pour remplacer, aider ou optimiser l’examen humain dans la détection d’erreurs ou d’anomalies.

Dans le même temps, plusieurs activités de recherches et de développements sont menées par des universités et d’autres institutions dans le but de passer au stade suivant à savoir une véritable aide à l’optimisation de la production et à la prédiction. Il est donc très probable que ces différentes études aboutissent dans les années avenir.