Les nouvelles technologies emboîtent le pas au secteur du sport. Nous avons vu dans de précédents articles que les objets connectés (IOT) améliorent les performances des sportifs débutants et experts. Nous avons aussi parlé de la Blockchain et de son fort potentiel sur la fan expérience ainsi que sur l’échange de données entre les acteurs. Aujourd’hui, nous réalisons l’ interview d’un acteur qui s’adresse aux fédérations sportives ainsi qu’aux clubs : Focus On Your Sport (FOYS).

Qu’est ce que FOYS ?

Cette nouvelle plateforme permet de digitaliser les associations sportives. Aujourd’hui les fédérations, les ligues et les clubs sont confrontés à un problème depuis l’essor du digital. Comment y remédier ? Quelles questions faut-il se poser autour du secteur du sport face à un avenir incertain ? Beatrice Traineau, entrepreneur et CEO de la plateforme FOYS nous décrypte sa vision.


INTERVIEW DE BEATRICE TRAINEAU 
CEO de la plateforme et application FOYS


Pouvez-vous nous présenter FOYS brièvement ?

Focus On Your Sport (FOYS) est une société qui vient de s’implanter en France. C’est une solution composée d’une plateforme et d’une application mobile qui s’adresse aux clubs sportifs. Nos interlocuteurs principaux sont les membres du bureau, les bénévoles et les permanents de grands clubs. FOYS consiste en un système intégré d’informations et de gestion qui simplifie la relation administrative, la communication et l’offre de services entre les clubs, les fédérations et leurs licenciés, pour remettre le sport au cœur de l’activité.

Son histoire 

Cette solution est née il y a une quinzaine d’années en Hollande, lorsqu’un papa décide d’inscrire son enfant dans un club de hockey sur gazon (sport majeur en Hollande). 

Il établit plusieurs constats : il manque des informations concernant les événements ou des précisions sur les convocations de son enfant de la part du club. À son grand désespoir, le co-voiturage – un aspect important dans l’organisation du sport loisir en Hollande où tout le monde se déplace en vélo – n’est pas géré du tout. Il décide alors de programmer une solution pour répondre à ce problème de manque d’informations par le digital.

Actuellement l’application est présente en Hollande, mais également en Irlande, Belgique, la Suisse, la Grande Bretagne, l’Allemagne et maintenant aussi en France. 

Comment vous définiriez-vous sur le marché ?

Nous nous définissons comme un acteur important sur le marché du digital avec un produit spécialement conçu pour aider le sport associatif à rester connecté à son public. 

La majorité des clubs cherchent à se professionnaliser. Nous les aidons à réaliser les tâches qui leur incombent en leur donnant accès à une solution qui leur permet de gagner du temps et d’éviter des tâches administratives trop chronophages. De ce fait, les bénévoles et les permanents peuvent se consacrer à d’autres missions, souvent plus en lien avec le service proposé aux pratiquants.

FOYS n’est pas un outil supplémentaire qu’il s’agit de maîtriser, c’est une solution à part entière, capable d’intégrer d’éventuelles solutions déjà existantes au sein d’un seul et même outil : cohérent, efficace et facile d’utilisation. 

Finalement grâce au digital, que revendique votre solution ?

FOYS aide les clubs et les fédérations qui doivent se battre contre l’apparition de communautés sportives indépendantes et accessibles 24/24, 7 jours/7. Ces communautés indépendantes constituent – pour certaines – de vraies menaces pour le sport fédéral et associatif. 

Grâce à mon expérience de l’offre sportive dite “commerciale”, je me suis rendue compte qu’il était temps de défendre aujourd’hui le sport associatif.  N’oublions pas : le sport s’apprend dans un club, pas via une app téléchargée sur un smartphone. Si nous voulons continuer à éduquer nos enfants en leur apprenant un sport, leur donner l’opportunité de connaître une passion sportive susceptible de les accompagner jusque dans leur vie d’adulte, alors nous devons soutenir l’action des fédérations et des clubs sur le terrain. FOYS se base sur ce constat et défend, par son entrée sur le marché, les intérêts du sport associatif dans son ensemble en proposant une solution adaptée, ludique et facile à utiliser.

Comment la solution prend forme ? À travers une plateforme digitale, une application ?

Exactement, le dispositif se compose d’une application pour bien communiquer avec l’utilisateur final, le licencié, mais le cœur de la solution est effectivement une plateforme. 

Comment voyez vous le secteur du sport dans 5 ans concernant chacune de ses parties prenantes (Etat, Fédérations, clubs, sportifs…) ?

Le sport est un marché en pleine évolution, qui bouge rapidement, la technologie nous a projeté dans un autre univers avec des délais qui ont changé. Bien qu’il soit de plus en plus difficile de faire des prévisions, il faut quand même disposer d’une vision qui se base sur un constat.

Le constat est que nos fédérations sont en perte de vitesse et de licenciés. Elles manquent de répondant et doivent envisager la rénovation de leur mode de fonctionnement pour rester compétitives et continuer à attirer des licenciés.

Il suffit d’écouter nos chers politiques : le sport est communément identifié pour créer du lien social, pour améliorer la santé de tout un peuple ! Le président Macron a d’ailleurs annoncé l’importance d’augmenter le nombre de pratiquants de plus de 3 millions pour la fin du quinquennat. Mais voyez-vous la nuance ? Il ne parle pas de licenciés, mais bel et bien de pratiquants, sauf que ces “pratiquants” sont souvent dans des communautés sportives indépendantes et digitalisées qui n’ont plus rien à voir avec la pratique du sport en association. En somme, les fédérations doivent se débrouiller toutes seules si elles veulent rester pertinentes. 

Ce qu’il faut ne pas oublier : les lieux dans lesquels les jeunes sportifs ont la possibilité d’apprendre un sport, dans lesquels on parle de formation, d’encadrement, de transmission, d’apprentissage et de détection, ce sont encore les associations sportives et les fédérations.

En France nous sommes organisés de cette façon. Aidons donc nos associations sportives à évoluer en les dotant d’outils 2.0.

L’évolution du sport selon vous ?

L’évolution du sport associatif, telle qu’elle se profile, est une tendance vers moins de licences. La population comprend de moins en moins le sens de cette licence. Il faut recréer du lien, travailler sur la rénovation des fédérations en insistant sur le sens du “service”. 

Aujourd’hui non seulement les licenciés mais certains clubs se posent la question de l’utilité de leur affiliation à une fédération ! Le système actuel est en pleine mutation : c’est l’occasion ou jamais de démontrer l’importance des ressources fédérales et de donner du sens à la licence. FOYS est là pour ça.

« Le digital permet de connaître et de s’adresser directement à l’utilisateur final »

Au siècle du digital, avons-nous encore besoin de tous ces échelons : ligues, régions, départements ? Pourtant la majorité de nos fédérations sont organisées de la sorte. Je ne suis pas compétente pour répondre à cette questions, mais je suis convaincue d’une chose : il faut que l’on puisse apprendre des sports aux enfants et aux adolescents, il faut que l’on propose une offre aux adultes, que ce soit du loisir ou de la compétition, et pour créer cette offre il faut connaître les clients. L’enjeu est de taille : le sport de haut niveau se nourrit de cette base de licenciés qui doit être aussi large que possible.

Il ne suffit pas de taper la balle en dehors de toutes structures !

« Il faut protéger cette cellule des licenciés et du club dans lequel les talents émergent sinon nous mettons en péril le sport de haut niveau. On ne peut pas laisser les choses se dégrader comme cela. »

Le digital permet de communiquer directement vers le consommateur final. C’est l’essence même des applications sportives qui vont chercher le consommateur et hesitent pas à le faire payer.

 L’évolution de la pratique sportive dans les années à venir se dirige vers une offre individualisée, disponible partout, réservable en direct, à réponse immédiate, déclinable, partageable, au sein d’une communauté d’intérêt. Regardez la plateforme “Besport” qui cherche à répondre à ce besoin très individuel de consommer l’information sportive à sa guise tout en relatant son expertise personnelle et ses exploits sportifs en direct, à créer son “personal branding”, sa mini “fan zone”.

A quoi sert une fédération sportive ?

Les attributions d’une fédération sont définies par la loi du 1er juillet 1901. Les fédérations organisent et développent leur sport, elles délivrent des licences, norment l’activité et planifient la formation. Leur champ d’intervention est vaste et les moyens grâce auxquels elles doivent assurer ces missions diminuent d’année en année. À mon avis, les fédérations doivent aujourd’hui mettre le service au cœur de leur activité, reconsidérer le lien avec leur licencié pour le toucher plus directement, de façon plus individuelle voire personnelle. 

L’avantage de notre solution se situe aussi à ce niveau là : un vrai gain de temps et une opportunité pour connaître et répondre via une offre adaptée, aux besoins des clients fédéraux. FOYS accompagne les associations sportives dans leur processus de mutation : de l’organisation administrative vers l’organisation de service !

Selon vous est-ce que les start up s’inscrivent dans un nouveau modèle d’éducation sportif et de la même manière changent notre façon de consommer le sport ? Pourquoi ?

C’est la question complexe de « l’oeuf et de la poule », qui a commencé ? Ces startups qui naissent grâce au digital sont des réponses à une demande venant du consommateur : mais en apportant une réponse, elles créent aussi le besoin, puis elles y répondent de nouveau …  

« C’est un comportement sociétal, les communautés digitales ont remplacé le besoin sociologique de vouloir faire partie d’un groupe, d’une association. Cela s’applique d’autant plus dans le sport »

Regardons Facebook, par exemple : au départ, personne n’en avait « besoin », tout était nouveau. Mais aujourd’hui le succès de ce réseau ne se dément pas : on a envie d’en faire partie, de prendre la parole, d’y retrouver ses “amis” et d’échanger avec sa communauté. Quant au sport et en véritable start-up, c’est aujourd’hui la plateforme BeSport qui souhaite devenir le nouveau « Facebook » du sport !

Ces solutions qui se servent des besoins sociologiques des Hommes (et des femmes) ont peu à peu modifié les comportements. Elles nous permettent d’échanger, de nous retrouver autour des mêmes centres d’intérêt. Cette interaction entre le digital et l’humain fait évoluer notre société. Les start-up du digital sont – par excellence – rapides, à l’affût de la nouveauté et plus facilement dirigeables qu’un gros paquebot. Elles comprennent bien ce qu’il se passe au moment où cela se produit. Elles sont fondamentalement opportunistes et utilisent le digital, pour être plus réactives. En comparaison, une fédération est plus compliquée à manœuvrer et a besoin plus de temps pour s’adapter.

Les start-up du digital contribuent à faire bouger les choses en proposant leurs offres autrement et je pense que de manière générale cela va dans le bon sens. Il y a un grand besoin de changement. 

Concernant l’éducation, je doute que le digital puisse répondre en intégralité aux besoins de ce sujet très exigeant.

Est-ce que vous pensez que les prochaines générations pourraient se désintéresser du schéma « type » d’apprentissage en club au profit de ces applications et de ces plateformes?

Le désintérêt est déjà un vrai sujet, il va falloir l’anticiper. Mais d’une manière générale, je crois au schéma d’apprentissage tel qu’il existe entre un professeur et son élève. Même si le digital joue un rôle important, le sport aura toujours besoin d’un professeur et d’un élève, accompagné d’un collectif pour certains sports. Pour acquérir un certain niveau de maîtrise, avoir de “bonnes sensations », développer une stratégie, rester motivé, soutenu, encouragé, l’aide d’un œil extérieur puis d’un professeur est crucial. Mais le digital est important et doit se mettre au service de l’enseignement pour soutenir la relation professeur/coach – élève.

« On ne pourra pas tout substituer par le digital et surtout auprès des enfants »

FOYS est une solution qui valorise ce lien et qui aide à faire en sorte que toutes ces personnes en clubs, notamment les professeurs, soient en mesure de s’adresser à cette nouvelle génération, volatile et parfois difficile à capter. Nous n’avons plus le choix : pour rester compétitif, pour être plus efficace et se concentrer sur le service à apporter aux générations futures et à leurs parents, il faut collectivement passer à la vitesse supérieure. Les structures de terrain ont besoin de nous, elles sont d’ailleurs prêtes à évoluer, elles recherchent des solutions. 

Aux fédérations maintenant de se tenir prêtes pour accompagner une révolution qui est déjà en marche.

Un grand merci à Béatrice pour cet entretien fort agréable ainsi que pour cet échange de vision autour des possibilités que nous offre le digital appliqué ici à la gestion des fédérations et des clubs sportifs.

A bientôt  😉 !