La première partie est ici

Que retenir des défaillances de Fantasia ? 

Les manquements de Fantasia illustrent deux points essentiels. Le premier est un biais cognitif appelé « la malédiction du savoir » que tout UX Designer essaie d’atténuer. Il surgit quand un individu est dans l’incapacité de se mettre à la place d’autres personnes n’ayant pas des connaissances aussi élevées que lui dans un domaine. Or, un des fondements de l’UX Design est justement de se mettre à la place d’un utilisateur découvrant une interface ou un produit pour la première fois. Concrètement, il s’agit de remettre en question ses idées ou attentes préconçues. 

Deuxième point essentiel illustré par ce jeu. On parlait au début du savant équilibre qu’entretient le Game Design entre challenge et maniabilité. Force est de constater que Fantasia échoue de manière spectaculaire à atteindre ce point d’équilibre. Plutôt que d’être stimulé,  le joueur est frustré, stressé et en colère face à la difficulté trop élevée du jeu. 

Pour comprendre cet équilibre que l’UX Design recherche, la psychologie est une aide précieuse.  Mihàly Csikszentmihaly, psychologue hongrois pionnier de la psychologie positive, a conceptualisé une expérience appelée flow. Elle est caractérisée par une concentration intense lors d’une activité et est accompagnée d’un sentiment de satisfaction et d’accomplissement. Pour atteindre l’expérience du flow, l’activité doit atteindre une balance entre le challenge et l’habileté du participant. Si le challenge est trop élevé, l’activité devient accablante, insurmontable et génère de l’anxiété. Si le challenge est nul, l’individu sombre dans l’ennui. Le flow se situe donc dans cet entre-deux – entre l’ennui et l’anxiété. En ce qui concerne les jeux vidéos, le défi réside donc dans la création de cette expérience du flow pour que le jeu soit stimulant et palpitant.  Le flow le juste milieu entre la compétence perçue et le niveau de défi

Le flow est une expérience caractérisée par une concentration intense lors d’une activité et est accompagnée d’un sentiment de satisfaction et d’accomplissementQuand toutes les conditions sont réunies, un joueur peut vivre cette expérience quand il est complètement immergé dans le jeu. Celui-ci perd alors complètement la mesure du temps et oublie son environnement extérieur. De manière évidente, les joueurs valorisent et recherchent des jeux apportant une telle expérience. Malheureusement peu de recherches alliant flow et jeux vidéos existent. Intégrer cette expérience du flow est pourtant crucial si le développeur veut augmenter l’attractivité et la rentabilité de ses jeux. 

Comment le secteur du jeu vidéo peut-il utiliser les méthodes de l’UX Design pour faire vivre à ses joueurs l’expérience du flow ? Premièrement, l’UX Design crée des prototypes et réalisent de nombreux retours à ses clients pour mieux situer les difficultés et les régler avec succès. Les feedbacks sont pleinement intégrés dans le processus créatif et contribuent à ce que le produit final soit parfaitement adéquat et adapté pour les utilisateurs. 

Deuxièmement, pour acquérir une connaissance aiguisée des pratiques, aptitudes et comportements est dressée une « carte d’empathie ». Cette méthode permet d’identifier les freins ou les points bloquants potentiels à une bonne expérience utilisateur. L’UX designer, en se mettant à la place de l’utilisateur, inventorie ce qu’il pense, entend, ressent lorsque celui-ci est en interaction avec un service / produit donné. Autre méthode utilisée, la « carte d’expérience » consiste à décomposer les actions de l’utilisateur lorsque l’utilisateur est en contact avec un produit ou un service. Situer précisément la durée, le degré de complexité, la fréquence permet ainsi de mettre en lumière les différentes possibilités d’interaction de l’utilisateur dans l’utilisation d’un service. 

la « carte d’expérience » consiste à décomposer les actions de l’utilisateur lorsque l’utilisateur est en contact avec un produit ou un service

la « carte d’expérience » consiste à décomposer les actions de l’utilisateur lorsque l’utilisateur est en contact avec un produit ou un service

En conclusion …

Le regard de la société envers les jeux vidéos est généralement méfiant ou dévalorisant. Comme le rapporte Samy Chafei ayant réalisé une thèse à MBAMCI sur l’innovation dans les jeux vidéos, ceux-ci sont généralement considérés comme « effrayants » en raison de l’état second dans lequel sont plongés les joueurs. Pourtant, les jeux vidéos sont une formidable opportunité d’apprentissage. Selon Daphné Bavelier, experte en neurosciences, ils favoriseraient la mémoire spatiale, augmenteraient le champ visuel et les réflexes à la condition d’être utilisés de manière raisonnable.
Aujourd’hui des infrastructures aussi diverses que la santé, la prévention ou le sport tentent de les utiliser pour en tirer le meilleur parti dans ce qu’on appelle des
serious games. Ces derniers rencontrent malheureusement un manque d’attractivité. L’UX design serait une piste intéressante pour susciter l’investissement des « joueurs » dans ces serious games et ainsi provoquer des comportements vertueux. En conclusion, l’apprentissage peut parfois reposer dans des supports incongrus ou inattendus comme une vidéo youtube ou des jeux vidéos.
Toutes les occasions sont bonnes pour apprendre !