Améliorer la pédagogie par l’intégration des technologies de l’information et de la communication (TIC) suscite toujours débats et passion au sein des communautés éducatives.

Numérique et éducation : un mariage de raison ?

Depuis une vingtaine d’années, de nombreux projets ont été portés à la fois par les institutions ministérielles ou académiques et expérimentés ponctuellement au sein d’établissements pilotes. Environnements Numériques de Travail (ENT), collège connecté, classe inversée ont été autant d’initiatives porteuses et les bénéfices liés à l’intégration des nouvelles technologies ne sont pas unanimement reconnus.

A fortiori, l’éducation a besoin du numérique pour augmenter les pratiques pédagogiques et les apprentissages de demain. Le numérique a besoin, quant à lui, de l’éducation pour voir naître les futurs talents de la Nouvelle Economie Numérique. Le mariage serait presque parfait si, en dépit de l’intérêt réel que ces nouveaux projets représentent, le chemin vers un déploiement à grande échelle semble lointain. Dresser un inventaire exhaustif des freins à ce déploiement n’est pas le propos de cet article. Force est néanmoins de constater que l’écart entre les Grands Projets numériques portés par les Institutions centrales ou académiques et leur application concrète au sein des établissements scolaires est notable.  Souvent, les expérimentations autour des projets numériques en établissements restent locales, les moyens sont inégaux d’une collectivité à une autre et la formation des enseignants à l’usage des TIC n’est pas optimale.

Le champ des opportunités pour les constructeurs, les intégrateurs et les développeurs est vaste. Toutefois, seuls ceux qui sauront répondre au(x) besoin(s) spécifique(s) de tout ou partie de l’écosystème scolaire, avec tout ce qu’il a de complexe sauront en tirer opportunités et bénéfices.

Hors les murs : objets connectés au quotidien chez les plus jeunes

Infographie - Usages des TICE chez les enfants et les adolescents

Infographie – Usages des TICE chez les enfants et les adolescents

La déferlante des objets connectés est un fait établi chez les moins de 20 ans. Les adolescents (13-19 ans) passent en moyenne 13h30 par semaine sur Internet en 2015, les 7-12 ans 5h30 par semaine et même les tout-petits suivent le mouvement avec 3h40 par semaine. Au-delà de ce temps consacré sur la toile, l’équipement personnel des enfants et adolescents prend des proportions aujourd’hui significatives. 58% des 13-19 ans ont un smartphone et 29% des 7-12 ans ont leur propre tablette.

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Les enfants de 5-8 ans ne possèdent pas, sauf à de rares exceptions, d’Apple Watch. Mais qu’à cela ne tienne, ils ont leur Jumpy ! Cette gamme de montres connectée via une application IOS et Android installée directement le smartphone des parents possède une fonction de géolocalisation, un écran tactile et la possibilité d’envoyer des messages entre autres fonctionnalités.

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Les lancements de produits connectés pour enfants pleuvent. La tendance ne fera que s’accélérer et penser à un quelconque retour en arrière relève du fantasme. L’enfant et l’adolescent sont ultra-connectés et agiles. Au-delà des objets connectés, ce sont les usages dont il est question et de la façon qu’ils ont de communiquer avec. Comment l’école peut-elle intégrer ces nouveaux usages et ces nouvelles interactions communicationnelles au cœur même de la pédagogie ?

Les initiatives institutionnelles et territoriales

A l’échelle nationale, la nécessité d’appréhender le numérique comme un vecteur d’optimisation des pédagogies fait son chemin. A titre d’exemple, le Ministère de l’Education  Nationale soutient actuellement 10 projets de services numériques dans le domaine de l’E-éducation. Chacun d’eux a été sélectionné pour bénéficier d’un soutien financier au titre des investissements d’avenir.

Au niveau régional et/ou académique, un certain nombre d’initiatives en matière d’usages numériques en établissement ont été portées par les Centres Régionaux de Documentation Pédagogique ou le Rectorats. La mission TICE du CRDP de Grenoble a mis en place un site utile pour les établissements scolaires entre autres souhaitant mettre en place des activités à vocation pédagogiques avec des tablettes : Tablettes numériques – expérimentations pédagogiques. Cet outil propose par exemple des scenarii pédagogiques ou encore un forum d’entre-aide pour tout établissement désireux d’intégrer une flotte de tablettes en son sein.

Localement, des expérimentations fleurissent dans certains établissements  autour des objets connectés. Nombreux ont été les établissements scolaires qui, à l’instar de l’école Saint-Exupéry de Longjumeau (91) ont adopté le tableau blanc interactif (TBI). Les impacts positifs de cette nouvelle technologie ont généré de nombreux bénéfices ; une meilleure interaction entre élèves ou une participation plus spontanée autour d’exercices dédiés.




La robotique pénètre également la classe comme l’atteste l’usage de plusieurs Robots Nao au sein de quelques écoles primaires ou collèges.  Les élèves s’initient à la programmation en mode transdisciplinaire autour d’axes pédagogiques déterminés. Plus d’infos >>




La liste de toutes ces expérimentations numériques est longue et, de prime abord, nous pourrions arriver à la conclusion qu’un déploiement optimal du digital est déjà une réalité ancrée dans les pratiques pédagogiques. Toutefois, des freins subsistent pour que l’école 2.0 voire 3.0 soit généralisée à travers tout le maillage territorial.

Freins et défis du déploiement numérique

Le « savoir-doser » pose un problème d’usage des outils numériques. Un usage intensif de ces derniers ne rime pas à qualité d’usage. Une étude de l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE) sur le comportement numérique des élèves, pointe notamment le fait  que les pays qui ont beaucoup investi dans le numérique n’ont pas enregistré d’amélioration notable des résultats en compréhension de l’écrit, mathématiques et sciences. « Ce n’est pas forcément parce qu’on utilise le numérique de façon intensive à l’école qu’on réussit bien aux tests numériques », explique Éric Charbonnier, analyste éducation à l’OCDE.

L’autre point révélé par cette étude est la surestimation des usages numériques de la part des élèves mais aussi des enseignants.  La généralisation du plan pour le numérique à l’école en France dès la rentrée 2016 ne fonctionnera que sous condition de collaboration de tous les acteurs de l’écosystème éducatif. D’autre part, le numérique à l’école ne peut pas s’arrêter à la plateforme numérique mais moduler le contenu des cours, la manière dont l’enseignement est dispensé.

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L’autre sujet corolaire à la focalisation sur le matériel numérique est le manque d’appropriation de la culture numérique en tant que vecteur d’orientation éducative de la part des élus. Rappelons-le, souvent,  le financement et le déploiement local des supports d’apprentissage éducatifs numérique, dépend des appels d’offres lancés par les Mairies pour les écoles primaires, les Conseils Généraux pour les collèges et les Conseils Régionaux pour les lycées. Ainsi, la mise en œuvre d’un Projet Educatif Territorial se doit d’être appliquée entre les collectivités, les services de l’État et les partenaires. Ce type de démarche impliquant tous les acteurs de l’écosystème favorisera un déploiement optimal des outils digitaux, d’une part, et le développement des usages enseignants/élèves, d’autre part.

Quelles opportunités pour les acteurs du digital ?

Proposer un produit – la plateforme digitale – mais également un service qui consisterait à accompagner systématiquement l’enseignant et à le former aux solutions. Actuellement certains industriels proposent aux établissements et aux collectivités des sessions de training destiné aux enseignants. Dispensées en mode pluridisciplinaire, celles-ci permettent d’augmenter l’usage des fonctionnalités du TBI et de ses applications/softwares associés.




Ne pourrait-on pas imaginer une systématisation de ces formations sur un large panel de plateformes numériques et d’applications ?

Faciliter l’automatisation des tâches récurrentes de l’enseignant pour lui laisser plus de temps pour s’approprier les applications pédagogiques est également une piste.

L’application I Doceo (disponible uniquement sur IPad) permet par exemple à l’enseignant de créer les emplois du temps, de suivre la notation des élèves et leurs progrès ou encore de prendre des notes au stylet. Les champs de développement d’applications sont larges pour  fluidifier les tâches récurrentes de l’enseignant.

Peut-on considérer que le digital va réinventer l’école ? Probablement pas. En revanche, le digital peut transformer en profondeur les pédagogies et les apprentissages si un déploiement des usages et plateformes est assuré.

Ce déploiement ne sera effectif que si tout l’écosystème éducatif et institutionnel joue le jeu d’un  Projet commun comme vu plus haut et si le partage des best practices numériques entre les établissements-pilotes et les autres est effectif.

Comme chaque année, le Salon Educatec-Educatice, spécialisé sur l’usage des outils numériques dans l’Education, se tiendra les 18, 19 et 20 Novembre 2015 à Paris. Les thèmes évoqués plus haut seront, entre autres, abordés entre experts, décideurs, professionnels des technologies éducatives, collectivités et industriels. Ces rencontres et débats génèreront-ils une prise de conscience collective quant au nécessaire déploiement numérique au sein des établissements scolaires ? A suivre…