Malgré le nombre assez conséquent d’opérateurs privés et publics*, la télémédecine en France est restée une discipline peu étendue et assez fragmenté contrairement à nos voisins européens et Nord-américains jusqu’à l’arrivée d’un certain Covid-19.
Face à des hôpitaux sous tension, des patients en panique et des centres d’appels submergés par les questions d’une population affolée! la télémédecine s’est révélée comme un vrai allié pour gérer tout ce flux en mettant en place un mécanisme de consultation ludique , simple, permettant au système de santé français de s’organiser rapidement afin d’optimiser le flux des demandes de consultation , de suivi et de communications face à cette pandémie .
Aussi, afin de renforcer l’implémentation de la télémédecine deux décrets le 10 et 20 mars sont venus assouplir les conditions de son utilisation , désormais et jusqu’au 31 mai 2020, la téléconsultation par vidéotransmission avec un médecin est remboursée intégralement par l’Assurance Maladie sans avance de frais.
Pareil pour les consultations avec une sage-femme où les séances de préparation à la naissance ainsi que les bilans de préventions sont couverts en intégralité par la sécurité, concernant les actes d’IVG « l’interruption volontaire de grossesse » médicamenteuses ces consultations peuvent être réalisées sous forme de téléconsultations.
Autre mesure pour les patients qui sont atteints ou suspectés d’être atteints de Covid-19 ou âgés de plus de 70 ans et n’ayant pas accès à la vidéotransmission , la téléconsultation par téléphone avec un médecin est aussi remboursée par l’Assurance Maladie.
Mais qu’entend-on exactement par télémédecine ?
Toute solution numérique qui recouvre tout aussi bien « des logiciels, des plateformes, des accès web, des applications spécifiques permettant un acte médical ou une activité de soins à distance » est enregistrée dans le chapitre de téléconsultation et ne doit en aucun cas se substituer au service médical ou soignant associé, réservée à l’usage exclusif des professionnels de santé autorisés à exercer en France.
Quels sont les médecins qui pratiquent la téléconsultation ?
Si 85% des téléconsultations sont facturées par des médecins libéraux et 8% par des centres de santé, ce sont les médecins généralistes qui réalisent le plus d’actes avec pas moins de 65% versus 35% pour les spécialistes ; On note aussi qu’une téléconsultation sur sept est facturée par un psychiatre, 1 fois sur 12 par un gynécologue et 5% par un pédiatre avec une concentration beaucoup plus importante en île de France qui comptabilise à elle seule près de 44% des consultations réalisées en France
Cette cartographie montre des disparités régionales avec un ratio de 87 % des médecins généralistes sur la région Pays de Loire beaucoup plus qu’en île de France ou en Alsace.
Quels sont les dispositifs proposés durant la pandémie ?
- En phase de pandémie, la prise en charge des cas les moins graves doit se faire à domicile pour ne pas saturer les établissements de santé. Des réflexes s’imposent alors, comme le fait d’appeler son médecin traitant au lieu de lui rendre visite et d’éviter d’appeler le 15 sauf en cas d’urgence grave.
- La mise en relation directe des patients présentant des symptômes avec le personnel soignant , une approche efficiente qui permet de réduire la propagation du virus aux populations de masse et au personnel de première ligne, en effet grâce à des plateformes de télésurveillances tels que @mydiabby ou @cardiauvergne le suivi des personnes à haut risque et souffrant de pathologies comme le diabète ou de cardiomyopathies , seront mieux qualifiés et suivi dès l’apparition des signes .
- La présélection des patients est un élément important qui permet d’optimiser les ressources et améliore le parcours des soins tout en réduisant le risque de transmission .
- Un personnel sans protection adéquate, sera mis en autoquarantaine directement pendant 14 jours, or l’utilisation de la télémédecine à travers le télétriage contribue à réduire le risque d’infection en éliminant complètement leur exposition .Le télétriage permet aussi d’optimiser le temps et les allocations des urgences au niveau des structures de santé.
Mais quelles sont les limites de la télésanté face au COVID-19 ?
Les limites de la téléconsultation découlent en premier lieu de problème technique, telle que l’insuffisance de réseau Internet ou d’équipement informatique et la plupart des hôpitaux n’ont toujours pas la capacité de fournir des services de télésanté, En effet, avant cela, la télémédecine était largement considérée comme un outil de soin ambulatoire ou post-actif et seules 2 % des téléconsultations ont été pratiquées par les établissements durant la période 2018–2019, rajouter que 40 % des plus de 70 ans ne disposent pas d’internet ce qui ne favorise pas son implémentation en pleine pandémie.
Côté formation, il y a un manque d’accompagnement et d’apprentissage des professionnels de santé , mais aussi d’accréditation des nouveaux médecins à cette nouvelle technologie , un élément important pour la vulgarisation de ce dispositif .
Sur le plan clinique, le risque de décompensation rapide de certains patients à haut risque nécessitant une hospitalisation rapide et limite l’usage conventionnel de la télémédecine .
La perception de cette «téléprésence» fournie par une consultation à distance peut-elle être assimilée à une consultation médicale vis-à-vis des patients ? Pas si sûre, l’absence d’examen physique démontre aussi la limite de la téléconsultation, d’autant que décrire ses symptômes n’est pas une évidence pour tous les patients.
La réalité pourrait être que pour cette pandémie du COVID19 la télémédecine telle qu’elle existe actuellement, doit être adapté pour aider à gérer les tests, le diagnostic, mais aussi le télétriage précoces pour ceux qui pourraient avoir besoin de soins hospitaliers.
Quels sont les freins à la téléconsultation?
Le fait de ne pas disposer d’outils nécessaires ainsi que les problèmes techniques liés au bug sont les premières raisons évoquées par le Personnel Soignant réfractaire à la télémédecine.
Pour certaines tranches de population c’est l’impossibilité de faire la téléconsultation qui freine le niveau d’adoption, pour d’autre c’est plus la déshumanisation qui est la principale crainte avancée par des patients en pleine crise.
Avec une gestion administrative limitée où le remboursement de l’acte n’est pas systématique et un télé paiement qui n’est pas toujours au point .
Sans encadrement strict Quelles seront les dérives de la télémédecine après le Covid-19 ?
Selon un sondage effectué par Doctolib 74% des praticiens et 80% des patients pensent poursuivre les téléconsultations après la l’épidémie, Néanmoins devant le nombre croissant de platesforme, le risque d’ubérisation et de marchandisation de la téléconsultation favorisera la sous-traitance des dossiers médicaux des patients à des sociétés tiers.
Le volume des données échangées durant de cette période n’est pas en reste avec un risque probable de cyber attaque, autant d’éléments sur lesquels il est impératif de sensibiliser les professionnels de la médecine.
Conclusion
La télémédecine a apporté une contribution importante aux secteurs de la santé dès le déclenchement de la pandémie, en évaluant , qualifiant les patients infectés par le COVID-19 , mais aussi en limitant le risque de propagation aux personnels soignants.
Il est clair que le niveau d’adoption de télémédecine diverge d’une structure à une autre et d’une région à l’autre il faudra par conséquent miser sur l’accompagnement du Personnel soignant et son accréditation , il est à noter aussi que la télésanté présente des limites lorsqu’il s’agit de traiter des patients à haut risque et si elle n’est pas bien utilisée, contribue d’avantage à surcharger les hôpitaux qu’autre chose .
Sources :
- https://francais.medscape.com/voirarticle/3602489
- https://esante.gouv.fr/sites/default/files/media_entity/documents/barometre_janvier_2020.pdf
- https://theconversation.com/le-confinement-un-accelerateur-pour-la-telemedecine-135448
- https://www.healthcareitnews.com/news/telemedicine-during-covid-19-benefits-limitations-burdens-adaptation
- ; le confinement , un accélérateur pour la télémédecine /Professeure des universités en management public et de la santé HDR,
Textes de référence
- Décret n° 2020-227 du 9 mars 2020 adaptant les conditions du bénéfice des prestations en espèces d’assurance maladie et de prise en charge des actes de télémédecine pour les personnes exposées au covid-19
- (*)liste des opérateurs recensés en France : https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/editeurs_solutions_de_telemedecine.pdf